LES SCANDALES ET CONTROVERSES ENTOURANT SEQENS

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LES SCANDALES ET CONTROVERSES ENTOURANT SEQENS : PORTRAIT D’UNE SOCIETE FRANÇAISE EN CRISE

La société française Seqens incarne aujourd’hui un paradoxe troublant de l’économie hexagonale : d’un côté, elle représente un acteur majeur de l’industrie chimique et pharmaceutique européenne, de l’autre, elle accumule les scandales et controverses qui ternissent gravement son image. Cette entreprise, qui opère à la fois dans les secteurs pharmaceutique et immobilier, s’est retrouvée au centre de multiples polémiques touchant à la fois la sécurité industrielle, la gestion immobilière et les relations sociales.

UNE SOCIETE A DOUBLE VISAGE

Seqens n’est pas une entreprise ordinaire. Elle présente la particularité d’opérer dans deux secteurs distincts : d’une part, elle constitue un géant de l’industrie chimique et pharmaceutique à travers ses activités de production de principes actifs pharmaceutiques et de molécules spécialisées ; d’autre part, elle gère un important patrimoine immobilier social en tant que filiale du groupe Action Logement. Cette dualité explique en partie la diversité des scandales qui l’entourent.

Le groupe Seqens, anciennement connu sous le nom de PCAS (Produits Chimiques Auxiliaires et de Synthèse), a été créé en 2018 par la fusion de plusieurs entités industrielles. Avec plus de 3 200 collaborateurs répartis dans le monde entier, l’entreprise produit notamment de l’aspirine, du paracétamol et diverses molécules destinées à l’industrie pharmaceutique mondiale. Parallèlement, en tant que bailleur social, elle gère plus de 105 000 logements sociaux, principalement en Île-de-France.

LA TRAGEDIE DE NEWBURYPORT : UN SCANDALE SECURITAIRE MAJEUR

L’un des scandales les plus graves concernant Seqens s’est déroulé aux États-Unis, dans l’usine de Newburyport, dans le Massachusetts. Le 4 mai 2023, une explosion d’une violence inouïe a dévasté l’installation pharmaceutique, causant la mort de Jack O’Keefe, 62 ans, un employé de longue date. L’incident a été qualifié de “violente explosion” par les autorités locales, qui ont retrouvé un réservoir industriel projeté à plus de 30 pieds de sa position initiale.

Cette tragédie n’était malheureusement pas un accident isolé. L’usine avait déjà connu des incidents graves auparavant, notamment en 2020 avec six explosions qui avaient traversé le toit du bâtiment. L’enquête menée par l’OSHA (Occupational Safety and Health Administration) a révélé une négligence flagrante en matière de sécurité. L’organisme a infligé des amendes de près de 300 000 dollars à Seqens, citant 11 violations, notamment l’échec à déterminer les risques de combustibilité des matériaux utilisés dans le processus impliqué dans l’explosion.

Des témoignages d’anciens employés ont émergé, décrivant des conditions de travail “dangereuses” et une culture de sécurité défaillante. Cette série d’incidents révèle un problème systémique dans la gestion de la sécurité industrielle au sein du groupe Seqens, remettant en question la capacité de l’entreprise à protéger ses salariés dans ses installations à travers le monde.

LA FERMETURE CONTROVERSEE DE VILLENEUVE-LA-GARENNE

En France, Seqens fait face à une autre crise majeure avec la fermeture programmée de son usine historique de Villeneuve-la-Garenne, dans les Hauts-de-Seine. Cette décision, annoncée en janvier 2025, constitue un véritable camouflet pour l’industrie pharmaceutique française et une trahison des promesses de relocalisation industrielle portées par le gouvernement.

L’ironie de la situation est particulièrement cruelle : en août 2020, Emmanuel Macron avait visité ce site en grande pompe pour en faire un symbole de la relocalisation industrielle française post-COVID. Le président de la République avait alors salué l’entreprise comme “un exemple de relocalisation par l’innovation”, promettant un avenir radieux à cette installation centenaire dédiée à la production de médicaments.

Moins de cinq ans plus tard, la réalité est tout autre. La direction de PCAS, filiale de Seqens, invoque une “situation financière catastrophique” avec des pertes approchant “un million d’euros par mois”. Le chiffre d’affaires du site s’est effondré de 83% entre 2022 et 2024, passant de 42 millions d’euros à seulement 7,2 millions d’euros.

Cette débâcle financière trouve son origine dans la faillite en juin 2024 de Mithra, une société belge de biotechnologie qui était devenue le client unique du site depuis 2020. La dépendance excessive à un seul client révèle une gestion stratégique défaillante et une incapacité à diversifier les activités. Les 86 salariés restants, après un premier plan social qui avait déjà éliminé 45 postes en 2023, se retrouvent dans l’incertitude malgré les promesses de reclassement.

UN BAILLEUR SOCIAL DECRIE PAR SES LOCATAIRES

Parallèlement à ses difficultés industrielles, Seqens fait face à une crise majeure dans sa gestion immobilière. En tant que bailleur social gérant plus de 105 000 logements, principalement en Île-de-France, l’entreprise accumule les critiques de ses locataires qui dénoncent une gestion défaillante et un service client inexistant.

Les témoignages sur la plateforme Trustpilot dressent un portrait accablant de la société. Avec une note de seulement 1,4 sur 5, les avis clients révèlent une litanie de problèmes : logements insalubres, présence de nuisibles, pannes récurrentes d’ascenseurs, problèmes de chauffage et d’eau chaude, et surtout, une incapacité totale à répondre aux demandes des locataires.

Les témoignages sont éloquents : “Je rejoins tous les avis négatifs sur Seqens et je constate que rien ne peut les atteindre”, écrit un locataire désabusé. Un autre dénonce : “Plus de 2 semaines sans eau chaude aucun moyen de contacter quelqu’un”. Les réclamations portent également sur des pratiques financières douteuses, avec des régularisations de charges qui tardent à arriver et des dépôts de garantie non restitués.

La situation est si préoccupante que des associations de locataires peinent à obtenir des rendez-vous avec la direction, malgré leurs demandes répétées. Les locataires dénoncent également des augmentations de charges inexpliquées et des prestations payées mais non exécutées.

DES PRATIQUES ENVIRONNEMENTALES QUESTIONNABLES

Bien que Seqens affiche des engagements environnementaux dans ses rapports RSE, la réalité de ses pratiques soulève des interrogations. Les activités de production chimique et pharmaceutique de l’entreprise génèrent nécessairement des déchets et des émissions qui impactent l’environnement. Si l’entreprise s’est engagée auprès du Science Based Targets initiative (SBTi) pour réduire ses émissions de CO2, les récents accidents industriels et la fermeture précipitée d’installations soulèvent des questions sur la réalité de ces engagements.

La fermeture de l’usine de Villeneuve-la-Garenne pose également des questions environnementales importantes : que devient le site industriel ? Quelle dépollution est prévue ? Ces aspects cruciaux semblent négligés dans la communication de l’entreprise, focalisée sur les aspects financiers et sociaux de la fermeture.

UNE GOUVERNANCE EN QUESTION

Les multiples scandales qui touchent Seqens révèlent des problèmes structurels de gouvernance. L’entreprise semble incapable de gérer efficacement ses deux activités principales, qu’il s’agisse de l’industrie chimique ou de la gestion immobilière. Cette situation interpelle d’autant plus que Seqens se présente comme une “société à mission” depuis 2022, censée intégrer des considérations sociales et environnementales dans sa stratégie.

La multiplication des incidents de sécurité, les difficultés financières récurrentes et l’incapacité à fournir un service de qualité à ses locataires suggèrent une défaillance généralisée du management. Cette situation est d’autant plus préoccupante que l’entreprise bénéficie de capitaux publics importants, notamment à travers sa filiale Action Logement.

L’IMPACT SUR L’INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE FRANÇAISE

Au-delà des aspects purement internes à Seqens, les scandales qui entourent cette entreprise ont des répercussions plus larges sur l’industrie pharmaceutique française. La fermeture de l’usine de Villeneuve-la-Garenne constitue un nouveau recul pour la souveraineté pharmaceutique française, dans un contexte où la pandémie de COVID-19 avait pourtant sensibilisé les pouvoirs publics à l’importance de maintenir des capacités de production nationales.

Cette situation illustre les difficultés structurelles de l’industrie pharmaceutique française, confrontée à une concurrence internationale féroce et à des coûts de production élevés. Le cas Seqens révèle également les limites des politiques de relocalisation industrielle, trop souvent basées sur des effets d’annonce plutôt que sur des stratégies de long terme.

VERS UNE REFONDATION NECESSAIRE ?

Face à l’accumulation des scandales et controverses, Seqens se trouve à un tournant critique de son histoire. L’entreprise doit impérativement repenser sa stratégie, améliorer sa gouvernance et restaurer la confiance de ses parties prenantes. Cette refondation passe par plusieurs chantiers urgents : renforcement de la sécurité industrielle, amélioration du service aux locataires, clarification de la stratégie industrielle et transparence sur les pratiques environnementales.

Les récents changements à la direction de l’entreprise, avec l’arrivée d’un nouveau directeur général et d’un nouveau président du conseil d’administration en mai 2024, pourraient constituer une opportunité de renouveau. Cependant, au-delà des changements de personnes, c’est toute la culture d’entreprise qui doit évoluer pour éviter que de nouveaux scandales ne viennent ternir l’image de Seqens.

CONCLUSION

Les scandales qui entourent Seqens révèlent les dysfonctionnements d’une société française qui peine à assumer ses responsabilités dans des secteurs aussi cruciaux que l’industrie pharmaceutique et le logement social. De la tragédie de Newburyport à la fermeture controversée de Villeneuve-la-Garenne, en passant par les multiples défaillances dans la gestion immobilière, l’entreprise accumule les échecs qui remettent en question sa légitimité et sa capacité à opérer dans des secteurs sensibles.

Cette situation interpelle plus largement sur la gouvernance des grandes entreprises françaises et sur la nécessité d’un contrôle renforcé de leurs activités, particulièrement lorsqu’elles bénéficient de capitaux publics ou opèrent dans des secteurs d’intérêt général. L’avenir de Seqens dépendra de sa capacité à tirer les leçons de ces scandales et à engager une transformation profonde de ses pratiques et de sa culture d’entreprise.

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